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ordre bienfaisant est quelquefois interrompu ; et le retard de l’inondation ainsi que le débordement subit du fleuve, qui survinrent la première année de la conquête, ont pu donner lieu à la fable édifiante qu’on a débitée sur ce point. On prétendit que la piété d’Omar ayant défendu le sacrifice d’une vierge qu’on immolait au Nil chaque année[1], le fleuve indigné demeura tranquille dans son lit, mais que, lorsqu’on y eut jeté l’ordre du calife, les ondes obéissantes s’élevèrent dans une nuit à la hauteur de seize coudées. L’admiration des Arabes pour le pays qu’ils venaient de conquérir, excitait le dérèglement de leur esprit romanesque. De graves auteurs assurent qu’on trouvait alors en Égypte vingt mille villes, ou villages[2] ; que, sans parler des Grecs et des

    de Cambridge, a jeté sur cette contrée un coup d’œil plus pénétrant :

    « Dans ces climats brûlans où le Nil, s’élevant au-dessus des bords de son lit d’été, verse de son large sein la vie et la verdure, et couvre l’Égypte de ses ailes humides, quel merveilleux spectacle s’offre aux regards, lorsqu’on voit, conduit par une rame hardie ou une voile légère ce peuple poudreux voguer au gré du zéphir, ou sur de frêles radeaux passer de l’une à l’autre de ces villes rapprochées qui s’élèvent et brillent au-dessus des flots dont elles sont environnées ! » (Works and Memoirs of Gray, édition de Mason, p. 199, 200.)

  1. Murtadi, p. 164-167. Le lecteur ne croira pas aisément à des sacrifices humains sous des empereurs chrétiens ou à un miracle opéré par des successeurs de Mahomet.
  2. Maillet, Description de l’Égypte, p. 22. Il indique ce