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savantages : l’ignorant législateur des musulmans a été souvent égaré par ses préjugés et par ceux de son pays, et les institutions établies pour le désert de l’Arabie, peuvent convenir assez mal, en bien des cas, à la richesse et à la population d’Ispahan et de Constantinople. Alors le cadi place respectueusement le Livre sacré sur sa tête, et l’interprète d’une manière plus conforme aux principes de l’équité et aux mœurs ou à la politique de son temps.

Du bien ou du mal qu’il a fait dans son pays.

Lorsqu’il s’agit, en dernier lieu, d’examiner quelle a été l’influence de la doctrine de Mahomet pour le bonheur ou le malheur de son pays, les chrétiens et les Juifs les plus violens ou les plus superstitieux conviendront sûrement que si ce prophète s’attribua une fausse mission, ce fut pour établir une doctrine salutaire et seulement moins parfaite que la leur. Il adopta pieusement pour base de sa religion la vérité et la sainteté des révélations de Moïse et de Jésus-Christ, leurs vertus et leurs miracles. Les idoles de l’Arabie disparurent devant le trône de Dieu ; le sang des victimes humaines fut expié par la prière, le jeûne, l’aumône, louables ou du moins innocens artifices de la dévotion, et Mahomet peignit les récompenses et les punitions de l’autre vie sous les images les plus conformes à l’esprit d’un peuple ignorant et charnel. Il était peut-être incapable de dicter un système détaillé de morale et de politique propre à ses compatriotes ; mais il inspirait aux fidèles un esprit de charité et d’affection ; il recommandait la pratique des vertus sociales, et, par