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disposition[1]. Aussi un riche vieillard, qui n’avait point d’enfans, était-il un tyran domestique ; son autorité croissait avec l’âge et les infirmités. Une foule de vils courtisans, parmi lesquels il comptait souvent des préteurs et des consuls, briguait ses faveurs, flattait son avarice, applaudissait à ses folies, servait ses passions, et attendait sa mort avec impatience. L’art de la complaisance et de la flatterie devint une science très-lucrative ; ceux qui la professaient furent connus sous une nouvelle dénomination, et toute la ville, selon les vives descriptions de la satire, se trouva divisée en deux parties, le gibier et les chasseurs[2].

Tandis que la ruse faisait signer à la folie tant de testamens injustes et extravagans, on en voyait cependant un petit nombre dictés par une estime raisonnée et par une vertueuse reconnaissance. Cicéron, dont l’éloquence avait si souvent défendu la vie et la fortune de ses concitoyens, recueillit pour près de cent soixante-dix mille livres sterl. de legs[3]. Il paraît que les amis de Pline-le-Jeune n’ont pas été moins généreux envers cet intéressant orateur[4].

  1. Voyez Heineccius, Antiquit. juris rom., l. II.
  2. Horace, l. II, sat. 5 ; Pétrone, c. 116, etc. Pline, l. II, let. 20.
  3. Cicéron, Philip., II, c. 16.
  4. Voyez ses Lettres. Tous ces testamens lui donnaient occasion de développer son respect pour les morts et sa justice pour les vivans. Il sut accorder ces deux sentimens dans la manière dont il se conduisit envers un fils qui avait été déshérité par sa mère. (V, I.)