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chesses que la puissance de Rome. Les états d’Italie ne payaient leurs tributs qu’en service militaire ; et dans les guerres puniques, les Romains entretinrent seuls à leurs frais, sur mer et sur terre, ces forces redoutables dont ils se servirent pour subjuguer leurs rivaux. Ce peuple généreux (et tel est souvent le noble enthousiasme de la liberté) portait avec joie les fardeaux les plus lourds, dans la juste confiance que ses travaux seraient bientôt magnifiquement récompensés. De si belles espérances ne furent pas trompées : en peu d’années les richesses de Syracuse, de Carthage, de la Macédoine et de l’Asie, furent apportées à Rome en triomphe. Les trésors de Persée montaient seuls à près de deux millions sterling ; et le peuple romain, roi de tant de nations, se trouva pour jamais délivré d’impôts[1]. [Leur abolition.]Le revenu des provinces conquises parut suffisant pour les dépenses ordinaires de la guerre et du gouvernement. On déposait dans le temple de Saturne ce qui restait d’or et d’argent, et ces sommes étaient réservées pour quelque événement imprévu[2].

Tributs des provinces.

L’histoire n’a peut-être jamais souffert de perte si grande ni si irréparable que celle de ce registre curieux[3], légué par Auguste au sénat, et dans le-

  1. Pline, Hist. nat., l. XXXIII, c. 3 ; Cicéron, De officiis, II, 22 ; Plutarque, Vie de Paul-Émile, p. 275.
  2. Voyez dans la Pharsale de Lucain une belle description de ces trésors accumulés par les siècles, l. III, v. 155, etc.
  3. Le : rationarium imperii. (Voyez outre Tacite, Suétone, dans Aug., c. ult., et Dion, p. 832.) D’autres empe-