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naissance superstitieuse. Son zèle et sa vanité l’engagèrent à établir la supériorité du culte du dieu d’Émèse, sur toutes les religions de la terre. Comme son premier pontife et comme l’un de ses plus grands favoris, il emprunta lui-même le nom d’Élagabale, nom sacré qu’il préférait à tous les titres de la puissance impériale.

Dans une procession solennelle qui traversa les rues de Rome, le chemin fut parsemé de poussière d’or. On avait placé la pierre noire, enchâssée dans des pierreries de la plus grande valeur, sur un char tiré par six chevaux, d’une blancheur éclatante et richement caparaçonnés. Le religieux empereur tenait lui-même les rênes ; et, soutenu par ses ministres, il se renversait en arrière, pour avoir le bonheur de jouir perpétuellement de l’auguste présence de la divinité. On n’avait rien épargné pour embellir le temple magnifique élevé sur le mont Palatin, en l’honneur du dieu Élagabale. Au milieu des sacrifices les plus pompeux, les vins les plus recherchés coulaient sur un autel entouré des plus rares victimes, et où l’on brûlait les plus précieux aromates. Autour de l’autel, de jeunes Syriennes figuraient des danses lascives au son d’une musique barbare, tandis que les premiers personnages de l’état, revêtus de longues tuniques phéniciennes, exerçaient les fonctions inférieures du sacerdoce avec une vénération affectée et une secrète indignation[1].

  1. Hérodien, l. V, p. 190.