Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/332

Cette page a été validée par deux contributeurs.

milieu des intrigues de la cour, des affaires les plus sérieuses et du dédale des lois, jette un éclat bien plus vif sur les cendres de Papinien que toutes ses grandes dignités, que ses nombreux écrits[1], et que la réputation immortelle dont il a joui dans tous les siècles comme jurisconsulte[2].

La tyrannie de Caracalla s’étend sur tout l’empire.

Jusqu’à ce moment, sous les règnes même les plus désastreux, les Romains avaient trouvé une sorte de bonheur et de consolation dans le caractère de leurs différens princes, indolens dans le vice, actifs quand ils étaient animés par la vertu. Auguste, Trajan, Adrien et Marc-Aurèle, visitaient en personne la vaste étendue de leurs domaines : partout la sagesse et la bienfaisance marchaient à leur suite. Tibère, Néron et Domitien, qui firent presque toujours leur résidence à Rome, ou dans des campagnes aux environs de cette ville, n’exercèrent leur tyrannie que contre le sénat et l’ordre équestre[3]. Caracalla déclara la guerre à l’univers entier. [A. D. 213.]Une année environ

  1. Au sujet de Papinien, voyez Historia juris romani, de Heineccius, l. CCCXXX, etc.
  2. Papinien n’était plus alors préfet du prétoire ; Caracalla lui avait ôté cette charge aussitôt après la mort de Sévère : c’est ce que rapporte Dion (p. 1287) ; et le témoignage de Spartien, qui donne à Papinien la préfecture du prétoire jusqu’à sa mort, est de peu de valeur, opposé à celui d’un sénateur qui vivait à Rome. (Note de l’Éditeur.)
  3. Tibère et Domitien ne s’éloignèrent jamais des environs de Rome. Néron fit un petit voyage en Grèce. Et laudatorum principum usus, ex æquo quamvis procul agentibus, Sævi proximis ingruunt. Tacite, Hist. IV, 75.