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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

Leur obéissance.

Durant une période de deux cent vingt ans, qui s’écoulèrent depuis l’établissement de cet adroit système jusqu’à la mort de l’empereur Commode, l’état n’éprouva que très-peu les malheurs attachés à un gouvernement militaire : le danger était encore éloigné. Le soldat eut rarement occasion alors de connaître sa propre force et la faiblesse de l’autorité civile ; découverte fatale qui, dans la suite, enfanta de si terribles maux. Caligula et Domitien furent assassinés dans leur palais par leurs domestiques[1]. Les secousses qui agitèrent la ville de Rome à la mort du premier de ces princes, ne s’étendirent point au-delà de l’enceinte de cette capitale. À la vérité, Néron enveloppa tout l’empire dans sa ruine. Dans l’espace de dix-huit mois, quatre princes furent massacrés ; et le choc des armées rivales ébranla l’univers. Mais cet orage violent, formé par la licence des soldats, fut bientôt dissipé. Les deux siècles qui suivirent la mort d’Auguste ne furent point ensanglantés par des guerres civiles, ni troublés par aucune révolution. L’empereur était élu par l’autorité du sénat et par le consentement des troupes[2]. Les légions respectaient leur serment de fidélité ; et les recher-

  1. Caligula périt par une conjuration qu’avaient formée les officiers des prétoriens, et Domitien n’eût peut-être pas été assassiné sans la part que les deux chefs de cette garde prirent à sa mort. (Note de l’Éditeur.)
  2. Ces mots l’autorité du sénat et le consentement des troupes, semblent avoir été le langage consacré pour cette cérémonie. (Voyez Tacite, Ann. XIII, 14.)