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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

Caractère et politique d’Auguste.

Les égards respectueux d’Auguste pour une constitution libre qu’il avait lui-même renversée, ne peuvent être expliqués que par une connaissance approfondie du caractère de ce tyran subtil. Une tête froide, un cœur insensible, une âme timide, lui firent prendre, à l’âge de dix-neuf ans, le masque de l’hypocrisie, que jamais il ne quitta. Il signa de la même main, et probablement dans le même esprit, la mort de Cicéron et le pardon de Cinna. Ses vertus, ses vices même, étaient artificiels : son intérêt seul le rendit d’abord l’ennemi de la république romaine ; il le porta dans la suite à en être le père[1]. Lorsque ce prince éleva le système ingénieux de l’administration impériale, ses alarmes lui dictèrent la modéra-

    p. 348, éd. Arntzen.) dit qu’Adrien reçut le premier ce titre lors de son adoption ; mais comme l’adoption d’Adrien est encore douteuse, et que d’ailleurs Trajan, à son lit de mort, n’eût probablement pas créé un nouveau titre pour un homme qui allait lui succéder, il est plus vraisemblable qu’Ælius-Verus fut le premier qu’on appela César, lorsque Adrien l’eut adopté. (Spart., in Ælio Vero, c. 1 et 2.) (Note de l’Éditeur.)

  1. « Alors survint Auguste, qui, changeant de couleur comme un caméléon, paraissait tantôt pâle, tantôt rouge, tantôt avec un visage sombre et renfrogné, et au même instant avec un visage riant et plein de charmes. » (Césars de Julien, trad. Spanheim.) Cette image, que Julien emploie dans son ingénieuse fiction, est juste et agréable ; mais lorsqu’il considère ce changement de caractère comme réel, et qu’il l’attribue au pouvoir de la philosophie, il fait trop d’honneur à la philosophie et à Octave.