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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

L’autorité de Platon et d’Aristote, de Zénon et d’Épicure, était constamment suivie dans les écoles : leurs systèmes, transmis d’âge en âge par leurs disciples avec une déférence aveugle, étouffaient les efforts du génie, qui auraient pu corriger les erreurs ou reculer les bornes de l’esprit humain : les beautés des poètes et des orateurs n’inspirèrent que des imitations froides et serviles, au lieu d’allumer dans l’âme du lecteur ce feu sacré dont ces hommes divins étaient embrasés ; et ceux qui osaient s’écarter de ces excellens modèles, perdaient bientôt de vue la route de la raison et du bon sens.

À la renaissance des lettres, le génie de l’Europe parut tout à coup : une imagination active et pleine de force, l’émulation nationale, une religion nouvelle, de nouvelles langues, un nouvel univers, tout l’invitait à sortir de l’engourdissement où il était enseveli ; mais dans l’empire de Rome, les habitans des provinces, subordonnés au système uniforme d’une éducation étrangère, ne pouvaient entrer en lice avec ces fiers anciens, qui, jouissant de l’avantage d’exprimer dans leur langue naturelle la hardiesse de leurs pensées, s’étaient emparés des premiers rangs. Le nom de poète était presque ou-

    hommes fort distingués, on voyait encore, sous Adrien, Suétone, Florus, Plutarque ; sous les Antonins, Arrien, Pausanias, Appien, Marc-Aurèle lui-même, Sextus-Empiricus, etc. La jurisprudence gagna beaucoup par les travaux de Salvius-Julianus, de Julius-Celsus, de Sex.-Pomponius, de Caïus et autres. (Note de l’Éditeur.)