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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

vitude[1]. L’existence d’un esclave devint un objet plus précieux ; et quoique son bonheur tînt toujours au caractère et à la fortune de celui dont il dépendait, la crainte n’étouffait plus la voix de la pitié, et l’intérêt du maître lui dictait des sentimens plus humains. La vertu ou la politique des souverains accéléra le progrès des mœurs ; et, par les édits d’Adrien et des Antonins, la protection des lois s’étendit jusque sur la classe la plus abjecte de la société. Après bien des siècles, le droit de vie et de mort sur les esclaves fut enlevé aux particuliers, qui en avaient si souvent abusé ; il fut réservé aux magistrats seuls. L’usage des prisons souterraines fut aboli, et dès qu’un esclave se plaignait d’avoir été maltraité injustement, il obtenait sa délivrance ou un maître moins cruel[2].

Affranchissement.

L’espérance, le plus consolant appui de notre imparfaite existence, n’était pas refusée à l’esclave romain. S’il trouvait quelque occasion de se rendre utile ou agréable, il devait naturellement s’attendre qu’après un petit nombre d’années, son zèle et sa fidélité seraient récompensés par le présent inestimable de la liberté. Souvent les maîtres n’étaient

  1. Gruter et les autres compilateurs rapportent un grand nombre d’inscriptions adressées par les esclaves à leurs femmes, leurs enfans, leurs compagnons, leurs maîtres, etc., et qui, selon toute apparence, sont du siècle des empereurs.
  2. Voyez l’Histoire Auguste et une dissertation de M. de Burigny, sur les esclaves romains, dans le XXXVe volume de l’Académie des belles-lettres.