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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. II.

place parmi les divinités romaines[1]. Cette indulgence n’avait rien de contraire aux anciennes maximes du gouvernement. Dans les plus beaux siècles de la république, Cybèle et Esculape avaient été invités, par des ambassades solennelles[2], à venir prendre séance dans le Capitole ; et pour séduire les divinités tutélaires des villes assiégées, on avait coutume de leur promettre des honneurs plus distingués que ceux dont elles jouissaient dans leur patrie[3]. Insensiblement Rome devint le temple général de ses sujets, et le droit de bourgeoisie fut accordé à tous les dieux de l’univers[4].

Liberté de Rome.

II. Les anciennes républiques de la Grèce avaient cru devoir conserver sans aucun mélange le sang de leurs premiers citoyens : cette fausse politique arrêta la fortune, et hâta la ruine d’Athènes et de Lacédémone ; mais le génie entreprenant de Rome sacrifia l’orgueil à l’ambition ; il jugea plus prudent et plus honorable à la fois d’adopter pour siens le mérite et la vertu partout où il les pourrait découvrir, fût-ce parmi les esclaves, les étrangers, les ennemis ou les barbares[5]. Durant l’époque la plus

  1. Tertullien, Apolog. c. 6, p. 74, édit. Haverc. Il me semble que l’on peut attribuer cet établissement à la dévotion de la famille Flavienne.
  2. Voyez Tite-Live, l. XI et XXXIX.
  3. Macrobe, Saturnales, l. III, c. 9. Cet auteur nous donne une formule d’évocation.
  4. Minutius-Felix, in Octavio, page 54 ; Arnobe, l. VI, page 115.
  5. Tacite, Annal. XI, 24. L’Orbis romanus, du savant