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tion, et qui eût peut-être donné la voie à d’autres poètes d’un savoir plus étendu, plus cohérent et plus conscient, et aussi mieux doués au point de vue rythmique… De son plan aux parties assez mal reliées, de ses notes en vue de l’Œuvre, des quelques parties écrites, il se dénonce qu’André Chénier n’eût pas rempli, même à peu près, les vouloirs d’une véritable « Poésie scientifique »… Il est même surprenant de le trouver alors, malgré l’enthousiasme, si loin de l’expression émotive et artiste des Élégies et des Églogues : elle est devenue ou plate ou ampoulée, en pleine rhétorique et maladroite, sans énergies d’évocation, de suggestion, servie d’images non adéquates à la pensée. Malgré ses rudesses, du Bartas est d’une autre intensité, et autrement vrais et émus son sens et son expression de l’Énorme et du Mystère !

Il est évident qu’il ne s’élève pas, n’eût pas su s’élever à la conception de l’impersonnalité du poète, de son « Moi » disparaissant, pour que le Verbe seul, d’évocation et de suggestion donne vie aux choses et aux êtres qu’il chante, — de manière que ce soient vraiment ces choses et ces êtres, resur-