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traduit aussi en latin, et l’un des traducteurs, Gabriel de Lern, la dédiant à la reine d’Angleterre, en 1583, — disait de Du Bartas : « Les pilastres et frontons des Librairies Allemandes, Polaques et Espagnoles, se sont enorgueillis de son nom uni à ceux de ses divins héros, Platon, Homère et Virgile. »

Le lecteur moderne, en France, et les poètes, ne connaissent point Du Bartas : ils se contentent de le voir à travers Sainte-Beuve. Et Sainte-Beuve, s’il a raison de reprendre et désapprouver telles et telles grandiloquences du poète, ses mots composés à la manière, aggravée, de la Pléiade, de maladroits essais de poésie imitative, en un mot maints passages dont le mauvais goût étonne, — Sainte-Beuve n’a rien compris à sa grandeur impétueuse et imposante, à sa pensée traditionnelle et aussi, pour sa part, novatrice. « Poète ardent et docte », dit-il pourtant. Or, il eût dû s’apercevoir qu’il devait insister sur les deux épithètes, sur la dernière surtout. Mais Sainte-Beuve était du Romantisme — qui, lui aussi, il est vrai, s’inspirait de la Bible, avec Lamartine, Hugo, de Vigny.