de celle-ci, confirma mes ſoupçons :
elle alla bien-tôt expier dans la ſolitude
d’une chambre obſcure, le crime
de m’avoir déplu, & d’avoir voulu
enlever à la Supérieure le cœur d’un
amant confirmé dans ſes bonnes graces.
Je ne fus pas long-tems à me repentir de ce que j’avois fait : je m’étois toûjours flatée que l’orage ne tomberoit que ſur la Mere Angelique, il alla plus loin. Le Directeur outré de ſe voir enlever ſa Maîtreſſe favorite, ſoupçonna mon amant d’être la cauſe de ſon malheur, il ne pouvoit ſacrifier que lui à ſon reſſentiment, il le fit, le chaſſa, & je ne l’ai pas revû depuis.
Voila mon Hiſtoire, ma chere Suzon, pourſuivit la Sœur Monique : je ne te recommande pas le ſecret, tu es intéreſſée à le garder, te voila aſſociée à mes plaiſirs ; helas, je n’en ai preſque pas goûté depuis que j’ai perdu mon amant ! Que n’eſt-il ici, continuoit-elle, en m’embraſſant, je le mangerois de careſſes ! Le ſouvenir de Martin l’animoit, ſes diſcours avoient produit ſur moi le même effet. Nous nous trouvâmes, ſans y penſer dans une diſpoſition qui ne nous permît pas d’attendre le lende-