que je fis de ma liberté, fut de me
tranquilliſer au lit juſqu’à dix heures,
la cloche eût beau ſonner, je ne parus
pas ; je m’aplaudiſſois du dépit que ma
deſobéiſſance devoit cauſer à nos vieilles.
Je me levai à la fin, je m’habillai,
& pour me mettre dans l’obligation de
ſuivre mon deſſein, je commençai par
déchirer mon voile de Penſionnaire,
que je regardois comme une marque
de ſervitude : je me ſentis le cœur plus
libre, il me ſembloit que je venois de
franchir un barriere, qui juſques-là s’étoit
opoſée à ma liberté. Mais comme
j’allois & je venois dans ma chambre,
ce maudit Godmiché ſe préſente encore
à mes yeux. Cette vûë me rend immobile,
je m’arrête, je le prens ; je
vais m’aſſeoir ſur mon lit, je me mets
à conſidérer l’inſtrument. Qu’il eſt beau !
diſois-je, en le prenant avec complaiſance
dans la main : qu’il eſt long ! qu’il
eſt doux ! c’eſt dommage qu’il ſoit ſi
gros, à peine ma main peut-elle l’empoigner.
Mais il m’eſt inutile… non
jamais il ne pourra me ſervir, continuai-je,
en levant ma jupe, & en eſſayant
de nouveau de le faire entrer dans
un endroit qui me faiſoit encore une
douleur cuiſante des efforts que j’avois
Page:Gervaise de Latouche - Histoire de dom B… portier des chartreux, 1741.djvu/68
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
58
Histoire de Dom B…