Page:Gervaise de Latouche - Histoire de dom B… portier des chartreux, 1741.djvu/355

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
313
Portier des Chartreux.


quitter pour ne nous jamais revoir. L’orage grondoit ſur notre tête, & le charme de l’illuſion le déroboit à nos yeux : Sauvés-vous, Suzon, vint nous dire une fille épouvantée, ſauvés-vous, fuyés par l’eſcalier dérobé ! Surpris, nous voulûmes nous lever, il n’étoit plus tems : un Archer féroce entroit au moment que nous nous levions : Suzon tremblante & éperduë ſe jette dans mes bras : il l’en arrache, malgré mes efforts il l’entraîne. O Dieux ! Cette vûë me rendit furieux, la rage me prêta des forces, le déſeſpoir me rendit invincible, un chenet, dont je me ſaiſis, devint dans mes mains une arme mortelle. Je m’élance ſur l’Archer : arrête, malheureux Saturnin ! Il n’eſt plus tems, le coup eſt porté, l’indigne Raviſſeur de Suzon tombe à mes pieds : on ſe jette ſur moi, je me deffends, je ſuccombe, je ſuis pris. On me lie, à peine me laiſſe-t’on la liberté de prendre la moitié de mes habits : adieu, Suzon, m’écriai-je, en lui tendant les bras, adieu, ma chere Sœur, adieu : on me traînoit inhumainement ſur l’eſcalier ; la douleur que me cauſoient les coups des marches contre leſquelles ma

  II. Partie.
P