cher Saturnin : j’accablai de plaiſir un
monſtre que j’accablai de reproches
quand je le reconnus. Il voulut m’apaiſer
par ſes careſſes, je le repouſſai avec
horreur ; il me menaça de reveler
à Madame Dinville ce que j’avois fait
avec toi. L’indigne employoit contre
moi les mêmes armes dont je pouvois
me ſervir contre lui ; il obtint par ſes
menaces, ce que j’avois refuſé à ſes
tranſports. Ainſi j’accordois tout à un
homme que je déteſtois, & la fortune
arrachoit de mes bras celui que j’adorois.
Je ne fus pas long-tems ſans ſentir les fruits amers de mon imprudence : je cachai ma honte auſſi long-tems que je le pûs ; mais je me ſerois trahie par un ſilence trop obſtiné. J’avois chaſſé l’Abbé Fillot ; il ſe conſoloit dans les bras de Madame Dinville. La néceſſité me le fit rapeller : je lui découvris mon état, il feignit d’y être ſenſible, il m’offrit de m’emmener avec lui à Paris, il ne manqua pas de me dire qu’il m’y feroit le ſort le plus heureux ; il ajoûta qu’il ne demandoit, pour prix de ſes ſervices que de vouloir ſouffrir qu’il me le rendit. Je ne voulois qu’être en un lieu où je puſſe me délivrer de mon