raiſon s’oppoſera vainement aux impreſſions,
que vos diſcours feront dans
leur cœur, ces impreſſions ſeront toûjours
dominantes, on s’en occupera,
on les careſſera, on voudra goûter de
ces plaiſirs, on craindra de ſuccomber,
on reviendra à vous ; voila le moment
déciſif : plaignés-les, flattés leur foibleſſe,
attendrifſés-vous avec elle, plus
de Morale, raſſurés leur cœur du côté
du Ciel, détruiſés leur préjugés, du
côté du monde, faites-leur enviſager
que ce n’eſt pas un ſi grand mal que de
céder à ſon penchant, que les faveurs
qu’une fille tendre peut accorder à ſon
Amant ne ſont rien quand elles ſont
enſevelies dans l’ombre du ſecret, qu’elles
n’en rendent la beauté que plus vive
& plus piquantes par les nouveaux
attraits dont elles l’embelliſſent, qu’il
eſt dangereux de garder trop long-tems
une fleur qui ſe fane tous les jours,
qu’il eſt ſi doux de la laiſſer cuëillir,
que ſa perte n’eſt qu’idéale, qu’un
mari, quelque habile qu’il ſoit, fut-il éclairé
par les yeux de la jalouſie même,
n’en ſauroit avoir le moindre
ſoupçon ; ajoûtés, d’une maniere détournée,
qu’il eſt mille ſecrets pour
empêcher ce que les filles craignent
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