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Histoire de Dom B…


ſolation, c’étoit avec lui que j’oubliois mes peines & mes douleurs.

J’étois un jour dans le fort de mon ouvrage écarté dans un lieu ſolitaire, je croyois n’avoir aucun témoin, & je me dulcifiois avec cette indolence voluptueuſe que la ſolitude permet. Un coquin de Moine m’obſervoit : il n’étoit pas de mes amis, au contraire, c’étoit un de ceux qui avoient toûjours marqué le plus d’éloignement pour moi ; il parut à mes yeux ſi bruſquement, que les bras me tomberent de ſurpriſe, & que je reſtai dans cet état expoſé à la malignité de ſes regards.

Je me crus perdu, je crus qu’il alloit publier partout mon avanture, & la façon dont il m’aborda me fit juger qu’il n’y avoit pas de compoſition à attendre de lui. Ha, ha, Frere Saturnin, en levant les yeux au Ciel, & croiſant les mains ; ha, Frere Saturnin, je ne vous croyois pas capable de faire de pareilles choſes ? Vous, le modele du Couvent, vous, l’Aigle de la Théologie, vous… Hé morbieu, interrompis-je bruſquement, finiſſons ces éloges ironiques : vous avés vû que je me branlois ; je n’ignore pas que vous allés en faire fête à tout le Couvent : hé bien, ſacre… continuai-je, en repre-