d’en pénétrer la cauſe, Ne ſeroit-ce pas
parce qu’une belle blonde avec ſes regards
languiſſans, ſemble vous prier de
lui donner votre cœur, & que ceux
d’une brune veulent vous l’enlever de
force. La blonde ne demande qu’un
peu de compaſſion pour ſa foibleſſe,
& cette façon de demander eſt bien ſéduiſante ;
vous croyés ne donner que
de la compaſſion, & vous donnés de
l’amour. La brune au contraire veut
que vous ſoyés foible, ſans vous promettre
qu’elle le ſera, Le cœur ſe gendarme
contre celle-ci, n’eſt-il pas vrai ?
Je l’avoüe à ma honte, il ne m’étoit pas encore venu dans l’eſprit de jetter ſur Suzon un regard de concupiſcence, choſe rare chez moi, qui convoitois toutes les filles que je voyois. Il eſt vrai qu’étant la filleule de la Dame du Village, qui l’aimoit & la faiſoit élever chez elle, je ne la voyois pas ſouvent. Il y avoit même un an qu’elle étoit au Couvent : elle n’en étoit ſortie que depuis huit jours que ſa maraine, qui devoit venir paſſer quelque tems à la campagne, lui avoit permis de venir voir Ambroiſe. Je me ſentis tout-à-coup enflammé du déſir d’endoctriner ma chere ſœur, & de goûter avec elle