core ne l’a-t’elle fait que par complaiſance
pour ſa Mere, le tems de prononcer
ſes vœux n’eſt pas encore arrivé :
ſon bonheur dépend de la mort
d’un frere, dont ſa Mere fait ſon idole.
Il court grand riſque de ne pas vivre
plus long-tems que ſa Sœur ne le ſouhaite.
Il s’eſt déja fait bleſſer à Paris dans
un Bordel… Un Bordel ! hé, qu’eſt-ce
que cet endroit, demandai-je à Suzon,
par preſſentiment ſans doute de ce qui
devoit m’y arriver un jour ; je vais t’en
dire, me répondit-elle, ce que j’en ai
appris de la Sœur Monique, qui ſait
tout ce qui a raport avec ſes inclinations.
C’eſt un lieu où s’aſſemblent des
filles tendres & faciles dont le métier
eſt de recevoir avec complaiſance les
homages des libertins, & de ſe prêter
à leurs deſirs, ſous l’eſpoir de la recompenſe :
leur penchant les y mene,
le plaiſir les y fixe. Ah, m’écriai-je,
en l’interrompant, que je voudrois être
dans une ville où il y eût de ces endroits-là !
& toi, Suzon ? Elle ne me
repondit rien, & je compris aſſez par
ſon ſilence, qu’elle ne ſeroit pas plus
cruelle qu’une autre pour ſon tempérament,
& que ce plaiſir n’auroit pas
moins d’empire ſur ſon cœur que ſur
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