tre l’autre, nous nous preſſions en ſoupirant,
nous nous frottions réciproquement,
nous nous repandions à chaque
inſtant. Les ſources de notre plaiſir gonflées
par un jailliſſement continuel, &
qui n’avoit d’autre iſſuë que de paſſer
de l’une dans l’autre, étoient comme
deux reſervoirs de délices, où nous
mourions plongées ſans ſentiment, où
nous ne reſſuſcitions que par l’excès du
raviſſement. L’épuiſement ſeul mit fin
à nos tranſports. Enchantées l’une de
l’autre : nous ne nous quittâmes qu’en
nous promettant de recoucher enſemble
le lendemain : elle y revint & me
rendit encore plus ſavante à cette ſeconde
entrevûë. Ces nuits charmantes n’ont
été interrompuës que par ma ſortie du
Couvent pour venir ici.
Ce que Suzon venoit de me raconter avoit ſi fort agi ſur mon imagination, que je n’avois pû refuſer à l’énergie de ſes diſcours des marques de ſenſibilité relatives au ſujet. Quoique j’euſſe affecté de vouloir lui dérober la vûë des larmes qu’elle m’arrachoit, le plaiſir de les répandre, les regards paſſionnés que je jettois ſur elle en les repandant, m’avoient trahi ; elle s’étoit aperçûë de mes mouvemens : mais charmée d’avoir fait