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me le rendait plus vigoureux. Il en vint jusqu’à me faire croire que l’intérêt de notre plaisir rendait ses absences nécessaires. J’y consentis, et l’infatigable Martin remplissait ces jours de relâche.

Hier, jour infortuné, et dont je ne dois me souvenir que pour le détester, hier était un jour de repos pour Verland. Renfermée seule avec Martin, et n’ayant pour témoin que l’amour, nous n’écoutions que ses conseils. J’étais couchée sur mon lit, la gorge nue, les jupes levées et les cuisses écartées, j’attendais que Martin reprît ses forces. Il était nu, et, pressant ma cuisse droite entre ses cuisses, me tenait d’une main les tétons et, de l’autre, caressait ma cuisse gauche. Tandis que ses yeux et sa bouche cherchaient à rallumer son ardeur, Verland, que nous n’attendions pas, entra et nous surprit dans cette attitude. Il eut le temps de fermer la porte et d’accourir à nous avant que la frayeur nous eût permis de changer de posture.

— Monique, me dit-il, je ne blâme pas tes plaisirs, mais tu dois avoir la même complaisance pour moi : j’aime Javotte (c’était le nom que Martin avait pris), je me sens des forces suffisantes pour vous contenter toutes deux.

Dans le moment, il veut embrasser Martin, il le tire de mes bras, il porte la main et trouve… Quelle surprise ! Sans lâcher Martin, il me jette un regard d’indignation. Il n’ose faire éclater contre moi sa colère, mais tout le poids en retombe sur la cause innocente. Son amour venait de se tourner en rage ; il frappait impitoyablement le malheureux Martin, et c’était moi qu’il frappait dans l’endroit le plus sensible.

Je me jette entre ces deux rivaux.

— Arrêtez, dis-je à Verland en l’embrassant ; mon