cinq ou six moines, amenés par le même motif que moi.
Nous partîmes à la file l’un de l’autre, et dans un profond
silence. Nous marchâmes jusqu’à ces antiques
chapelles qui servaient de rempart à la piscine d’un
côté. Nous descendîmes sans lumière dans un caveau,
dont l’horreur semblait être ménagée pour préparer un
nouveau charme au plaisir qui devait la suivre. Ce
caveau, que nous traversâmes à l’aide d’une corde attachée
contre le mur, nous conduisit à un escalier qui
était éclairé par une lampe. Le Prieur ouvrit la porte
qui fermait cet escalier. Nous entrâmes, par un petit
détour, dans une salle galamment meublée, autour de
laquelle paraissaient quelques lits commodes pour les
combats de Vénus. Nous y vîmes les apprêts d’un
magnifique repas. Personne ne paraissait encore ; mais
bientôt, au bruit d’une sonnette que le Prieur tira, nous
aperçûmes une vieille cuisinière, qui fut suivie dans le
moment de nos Sœurs, qui étaient au nombre de six en
tout, et qui me parurent charmantes. Chacune d’elle
fût se jeter dans les bras de quelqu’un de nos moines,
et je restai seul témoin de leurs transports, et piqué de
l’indifférence qu’elles affectaient d’avoir pour un nouveau
Frère qui s’imaginait qu’elles devaient venir lui
prodiguer leurs caresses. Mais le nouveau Frère eût
bientôt son tour, et en fut dédommagé avec usure.
On n’observait pas à la piscine plus scrupuleusement l’intention du fondateur qu’on ne le faisait aux repas du Père Casimir. Point de maigre, les viandes les plus exquises servies avec toute la propreté possible, s’y trouvaient en quantité. On se mit à table ; chacun, à côté de sa chacune, mangeait, buvait, patinait, baisait, parlait foutaise avec autant de liberté qu’il y en avait à nos festins des orgues. Je ne me sentais pas d’appétit.