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loin derrière nous le Révérend Casimir. Surpris lui-même de l’opiniâtreté du combat, qui avait déjà coûté bien du sang aux deux partis, il joignit son admiration à celle de la compagnie, qui, rangée autour de nous, attendait dans un silence respectueux l’issue de la bataille. J’étais furieux que Marianne osât me tenir tête, à moi qui n’avais pas foutu depuis plus de huit ans, à moi qui croyais avoir rassemblé dans ce moment tous les désirs et toutes les forces que j’avais pu acquérir pendant un si long temps. Elle était enragée de trouver un moine qui soutint ses efforts sans s’ébranler, elle qui avait désarçonné les plus vigoureux de la bande. Le foutre et le sang confondus ruisselaient sur nos cuisses, nous n’en étions que plus animés. Déjà nous avions déchargé quatre fois, quand je m’aperçus que Marianne, fermant l’œil, baissant la tête, et laissant tomber les bras, attendait sans mouvement que par une cinquième décharge, je lui donnasse le coup de grâce. Elle n’attendit pas longtemps, elle le reçut, et, après l’avoir savouré pendant quelques minutes, elle s’échappa de mes bras et me dit qu’elle se rendait fière de la victoire que je venais de remporter. Je pris un grand verre que je lui présentai, et lui versant une rasade, j’en pris autant de mon côté, et choquant ensemble, nous scellâmes notre réconciliation dans le vin.

La fin du combat avait fait remettre chacun à sa place. J’étais, entre l’oncle et la nièce, l’objet des caresses de tous les deux. L’un avait la main sur mes fesses, l’autre l’avait sur mon vit. Les éloges que l’on nous donnait firent bientôt place à une conversation plus réglée. Ce fut Casimir qui l’entama. Le sujet en fut la bougrerie. Casimir en prit la défense comme un tendre père prend celle d’un enfant chéri. Il possédait à