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cher oncle. Le portier du couvent était à la dévotion du Père, et par cette voie tout entrait aisément : vin, viande, filles, tout y avait un libre accès. Les orgues avaient été choisies, préférablement à tout autre endroit, pour le lieu de la scène de ces orgies, parce que, me dit le Père Casimir, on ne nous soupçonnera jamais de passer la nuit dans l’église. Une autre raison, c’est que nous sommes tout portés pour assister aux offices, et cette exactitude ferme la bouche aux babillards.

Malgré le soin que le Père Casimir prenait pour conserver ses élèves, il en perdait toujours quelqu’un ; j’en dirai la raison : quelquefois, le souvenir des obligations, au lieu de produire de la reconnaissance, fait des ingrats. Ces déserteurs se servaient contre le Père des traits qu’il leur avait appris à aiguiser contre les autres. Un d’eux fit sur lui ce sonnet qui doit passer à la postérité la plus reculée, à côté du fameux sonnet de Desbarreaux.

SONNET

Un jour, dom Happecon, plus arrogant qu’un coq,
Las de sentir son vit aussi droit qu’une quille,
Sortit de son couvent, enfoncé dans son froc,
Et fut chez la Dupré demander une fille.

Le bougre, qui jamais ne foutait qu’en escroc,
Pour qui cinq ou six coups n’étaient qu’une vétille,
Crut qu’il ne s’agissait que d’essuyer le choc,
Et tira son engin de dessous sa mandille.

— Tout beau, dit la putain, rengaine l’instrument ;
On commence d’abord par payer largement :
De foutre on vit ici, comme au Palais d’épices.

Le pater étonné de ce foutu cartel,
Quitta faute d’argent, ce pilier de bordel,
Et fut de désespoir, enculer deux Novices.