élévation de ce pont n’empêche pas de le faire aussi long que possible. C’est le sens de ut sit libramentum quam longissimum, que Belgrand néglige de traduire. Il est bien vrai que la poussée au vide existe toujours quand il y a un coude, mais il est bien certain que la résultante des deux forces représentant l’intensité de cette poussée est d’autant plus grande que l’angle est plus aigu, le coude, le geniculus plus prononcé. Les tuyaux de plomb, en quittant le tablier du pont pouvaient, bien être disposés de manière à ce que le raccord de la partie horizontale avec la partie inclinée formât une courbure assez allongée et non un angle, et que cette courbure même fût butée par la maçonnerie.
4o Si les tuyaux de plomb usités par les Romains pour leurs siphons avaient eu les dimensions des tuyaux de fonte de la Dhuis, il est bien certain que leurs joints à emboîtements n’y auraient pas résisté. Mais nous savons qu’un tuyau unique de fort diamètre y était remplacé par plusieurs tubes de petite section ; et au surplus les nœuds de soudure des tuyaux romains étaient mieux faits et plus solides que Belgrand ne l’affirme, un peu trop gratuitement.
Reprenons le texte à la suite :
« Eliam in ventre colliviaria (ou colluviaria) sunt facienda, per quae vis spiritus relaxetur. »
Ce passage a été fort discuté, d’abord à cause du terme colliviaria, que n’ont pas toutes les éditions. Il se trouve dans l’édition de Joconde (Venise, 1511), la plus ancienne dont l’auteur soit nommé. Valentin Rose l’adopte en la donnant pour la leçon du manuscrit princeps. Ce mot, qu’on ne rencontre pas ailleurs que dans ce passage de Vitruve, est dérivé trop directement du mot colluvies (courant d’égout), pour qu’on puisse hésiter sur son sens. Il ne peut désigner que des tuyaux de vidange, déchargeant à volonté par une manœuvre de robinets les eaux de la conduite dans le thalweg ; non pas tant, en l’espèce, pour entraîner des boues, des impuretés, que d’abord, cela va de soi, pour vider le siphon en cas de visite ou de réparation à faire, et, dit Vitruve, « ut vis spiritus relaxetur ». Je propose pour vis spiritus la traduction littérale « force d’aspiration[1] ». La colonne d’eau
- ↑ Spiritus signifie à la fois souffle et aspiration. Aspiratio ne correspond pas au sens usuel du français aspiration, mais signifie au contraire émission d’air.