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« un devoir pieux envers sa mémoire » et semble douter de l’accueil qui lui sera fait : la théorie du son et l’analyse indéterminée, tels étaient, pour l’un comme pour l’autre, les seuls titres de cette femme supérieure au souvenir de la postérité. Nous allons voir combien la postérité se montrerait injuste en restreignant ainsi son hommage.

Fontenelle, racontant que le savant Bourdelin[1] avait, à seize ans, traduit tout Pindare et tout Lycophron et entendait sans secours le grand ouvrage de la Hire sur les sections coniques, s’écrie : « Il y a loin des poètes grecs aux sections coniques ! » De son côté Condorcet, constatant à quel point les poètes de son temps furent indignés d’être jugés par un géomètre, écrit : « La sécheresse des mathématiques leur semblait devoir éteindre l’imagination et ils ignoraient sans doute qu’Archimède et Euler en ont mis autant dans leurs ouvrages, qu’Homère et l’Arioste en ont montré dans leurs poésies[2] ». Condorcet et FonteneIIe étaient

  1. Éloge de Bourdelin. Le médecin, l’un des fils du chimiste qui avait été Iui-même de l’Académie des Sciences.
  2. Éloge de d’Alembert.