Et puisque le destin les range sous ta loi, [475]
Traite-les en sujets, de tyran deviens roi.
Surmonte en leur faveur ton humeur sanguinaire ;
Et de gendre inhumain, sois maître débonnaire.
N'irrite point des maux, dont tu fus seul auteur ;
Et force-les d'aimer un prince usurpateur. [480]
Juge par cette amour qu'a pour moi la province,
Comme les bons sujets chérissent un bon prince ;
Sois vainqueur de ton vice après m'avoir vaincu ;
Et pour te faire aimer, vis comme j'ai vécu,
Ou si ta cruauté n'est pas bien assouvie, [485]
Épargne ton état, et prends encore ma vie :
Marche (si tu le veux) sur mon front oppressé,
Pour monter dans le trône où tu m'as renversé :
Mais saoule à tout le moins ta fureur en ma perte,
Et ne te fais point roi d'une ville déserte. [490]
Songe, en voyant l'état où tu nous as réduis,
Que tu pourras tomber au désastre où je suis ;
Et que si l'équité n'est jamais assurée,