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Est d'en faire endurer à l'objet que l'on aime.

Tigrane, cher époux, je connais en effet,

Par le mal que je sens, celui que je t'ai fait, [1515]

Lorsque ma volonté qui règne sur la tienne,

Força ta main au coup que tu veux de la mienne,

Mais bien qu'après un coup qui m'obligea si fort,

Mon coeur paraisse ingrat en refusant ta mort,

S'il est vrai, cher époux, que ce refus te blesse, [1520]

En faveur de l'amour pardonne à ma faiblesse ;

Tu fis voir ton ardeur en un don si plaisant ;

Et je fais voir la mienne en te le refusant.

OROSMANE

Non, non, la raison veut qu'on suive son envie :

Je conclus à sa mort, moi dont il tient la vie ; [1525]

Et malgré le discours que je viens de tenir,

Je vois bien qu'il est temps de songer à finir.

Ne nous opposons plus aux fières destinées ;

Achevons ses malheurs avec ses années,

Et puisqu'aucun secours ne peut nous arriver, [1530]

Ne lui refusons pas ce qui le peut sauver.

POLIXENE

Hélas ! Tout m'abandonne en si triste aventure !

OROSMANE

Votre amour y résiste aussi fait la nature ;