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La petite Rosemonde, que tout le monde appelait la petite rosse, par abréviation, et parce que ça lui allait parfaitement, se faufila entre un décor et un canapé posé sur bout, et vint se camper devant le régisseur en demandant : « J’ suis bien ? » Elle jouait, Pour le Drapeau, le brave petit jeune homme qui veut s’engager malgré sa maman, et elle n’avait pas cru trouver un costume plus assorti à son rôle que celui de « Champion du diabolo », qui lui avait valu tant de succès dans la dernière revue. Elle portait donc une culotte bouffante et une veste courte en velours mordoré, des chaussettes de soie mauve, une large ceinture rouge, un vaste col blanc de baby et une petite perruque blondine et poupine, frisée à l’Enfant-Jésus.

Le régisseur esquissa une moue dubitative. Mais Rosemonde pensait déjà à autre chose, et, de très près, avec ces gestes frôleurs et peloteurs qu’elle avait toujours pour quémander ou pour s’excuser, elle dit, très doucement : « M’sieur Marbrerot… dans les nouvelles scènes de la revue, je voudrais bien jouer la Tomate. »

L’autre eut un haut-le-corps. « Mais, mon enfant, tu sais bien que tous les rôles sont distribués. C’est Josette qui l’a, la Tomate. »

Chaque fois que Rosemonde travaillait à mériter son surnom de Petite Rosse, elle baissait les yeux avec un air si candide, si ingénu, qu’on mourait d’envie de lui flanquer des calottes. Ce fut donc les yeux baissés, la mine angélique, qu’elle susurra d’une voix calme : « Justement, c’est pour ça. »

Pour toute réponse, le régisseur tour-