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ESCAL-VIGOR

Quel banquier généreux lui avance des sommes considérables sans garantie, sans la moindre chance d’être jamais remboursé ?

Soudain, il comprit.

Blandine ! Blandine qu’il venait d’insulter si grossièrement. Les rôles étaient renversés. C’était lui l’entretenu ! Au lieu de le calmer, dans les dispositions d’esprit où il se trouvait, cette découverte l’exaspéra.

Au diapason où il était monté, rien ne pouvait balancer l’injustice dont il avait à se plaindre.

Il relança la jeune femme :

— De mieux en mieux, fit-il. Je sais tout. Tu m’achètes, tu m’entretiens ; je ne possède plus un sou vaillant. L’Escal-Vigor devrait t’appartenir. C’est à peine s’il représente la valeur des sommes que tu m’as données. Mais, ma chère, vous avez fait un faux calcul en vous flattant ainsi de me lier à vous, de me rendre votre chose lige… Non, non, je ne suis pas à vendre. Je sortirai d’ici. Je vous laisse le château. Je ne veux rien de vous…

Puis, reprit-il, atrocement persifleur, comme s’il se mutilait lui-même, après ce que je t’en ai avoué, tu eusses fait une piètre acquisition en ma