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— On y est ! repartit Griffe-Esgourde qui s’était tenu jusque-là en bas occupé à quelque besogne mystérieuse, mais ne voulait pas manquer l’égorgement.

Les deux navires ne sont plus qu’à vingt pas. Les voiles du Saint-Elme, largement déployées, enlèvent l’air à l’espagnol qui jette sa seconde bordée.

Deux hommes du pirate, éventrés, tombent sur le pont.

Un hurlement de rage s’étend sur l’océan. Le soleil, qui se couche au lointain, semble couvrir le ciel de flammes rouges…

Cinq pas séparent maintenant l’éperon du Saint-Elme de la poupe de l’autre.

Alors, agile comme un singe, brandissant un sabre et un pistolet, nu et bronzé aussi comme un dieu grec, La Manchette saute…

À sa suite tout le monde s’élance.

C’est l’assaut.

L’espagnol est peuplé de femmes que ses défenseurs ont fait descendre dans l’entrepont. On les entend se lamenter et pousser des cris d’épouvante ou des prières. Quant aux matelots, ils font tête courageusement.

La boucherie commence.

C’est une mêlée confuse où l’on ne tire que peu de coups d’armes à feu. On se sert de sabres, lourds comme des couperets, qui font d’épouvantables blessures. Comme des diables, les hommes du Rouquin s’agitent et apparaissent partout à la fois. Les autres sont plus de cinquante, mais ils ont la timidité défensive des honnêtes gens. Les pirates ne font attention à rien. Ils se jettent à la mort comme au giron d’une maîtresse.

C’est effrayant.