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sur l’épais navire d’Espagne, qui faisait un sillage écumant.

— Aux armes ! dit paisiblement le marquis. Préparez-vous, mes gars !

Les gaillards de l’équipage vinrent se ranger sur le pont en tenue d’assaut. Ils étaient admirables. Toute leur vêture se résumait dans un pantalon, parfois même déchiré et accourci par d’innombrables mésaventures. Tous avaient le torse nu et quelques-uns y arboraient des balafres larges de trois doigts. La collection de blessures guéries dont s’ornait le personnel du pirate aurait fourni, à un médecin, des sujets d’études pour dix volumes in-folio…

Et tout le monde attendit.

C’est alors que la belle Adussias revint sur le pont. Elle avait fait une toilette de sa façon, dont le charme certain et la grâce évocatrice transportèrent l’équipage enthousiaste. C’est qu’elle était nue…

— Bravo ! cria le marquis. Viens, Adussias que je te pose un baiser sur le sein droit.

Le Rouquin grogna :

— Monsieur, je n’aime pas ces familiarités.

— À la guerre, monsieur, répondit noblement le gentilhomme, les femmes deviennent d’usage public, comme tout ce qui délasse, soutient et fait ardre les combattants.

— Monsieur, dit le Rouquin, c’est ma femme.

— Bien, monsieur, dit le marquis avec dignité. Ce soir elle pourrait bien être la mienne.

Le capitaine tira son lourd sabre d’abordage, mais, plus prompt, son adversaire lui avait mis un pistolet sous le nez.