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mante une chanson qui était à la mode lorsque Paris lui fut défendu.

Il est probable qu’on n’en parlait plus depuis longtemps aux Porcherons où elle avait été lancée, mais, sur le Saint-Elme, elle faisait figure de haute nouveauté.

Cependant, le bateau s’approchait avec un rien de méfiance eut-on dit. Tout son armement se réduisait à une batterie dont le Rouquin, lunette à l’œil, dit qu’arrimée comme elle se trouvait, elle ne tiendrait pas deux bordées. On voyait, par les hublots, des faces inquiètes et les matelots tendaient de la voilure pour fuir le malencontreux Saint-Elme qui faisait d’ailleurs l’innocent.

Bientôt on vit le pavillon du survenant : c’était un espagnol.

— Mort de Dieu, grogna le Rouquin, il y a longtemps que je n’ai pendu des gens d’Estramadure. Ce bateau arrive à point…

Mais l’espagnol était bien commandé. Tout en semblant fort à l’aise, il se laissa dériver par le vent, puis, mettant franchement le cap à l’opposite de sa venue, il commença à fuir de toutes ses voiles.

— Par les cent mille diables de l’enfer, hurla le capitaine du Saint-Elme, la charogne se méfie de nous. Hissons notre pavillon !

Et brusquement, à la corne d’artimon, monta le sinistre emblème de la piraterie : la flamme noire portant une tête de mort au milieu.

Et la poursuite commença.

Le Saint-Elme était de coque plus effilée que l’autre, moins chargé aussi et prenant mieux le vent. Il gagna tôt