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même qu’on sent bien plus la beauté et la noblesse d’une belle peinture de madone, quand elle nous a été cachée pour un moment par quelque tête vulgaire. Mais cette présence de Dinah en son esprit ne faisait que l’aider à mieux supporter l’humeur de sa mère, qui était devenue de plus en plus chagrine pendant la dernière heure. La pauvre Lisbeth souffrait d’un singulier conflit de sentiments. Sa joie et son orgueil de l’honneur fait à son fils chéri Adam commençaient à céder à la jalousie et à l’inquiétude qui avaient repris une nouvelle force lorsqu’Adam vint lui dire que le capitaine Donnithorne désirait qu’il se joignît aux danseurs de la grande salle. Adam se trouvait de plus en plus hors de sa portée ; elle regrettait ses anciennes inquiétudes, parce qu’alors Adam s’occupait davantage de ce que disait et faisait sa mère.

« Eh ! c’est beau à toi de parler de danse, dit-elle, quand il n’y a pas cinq semaines que ton père est dans sa fosse. Et je voudrais bien y être aussi, au lieu de prendre sur cette terre la place de personnes plus gaies.

— Allons, ne prenez pas les choses ainsi, mère, dit Adam, qui était décidé à se montrer doux pour elle. Je n’ai point l’intention de danser, je regarderai seulement. Et du moment que le capitaine désire que j’y sois, il semblerait que je pense en savoir plus que lui, si je disais que je préfère ne pas rester. Et tu sais comme il s’est conduit à mon égard aujourd’hui.

— Eh ! tu peux faire comme tu voudras, car ta vieille mère n’a pas le droit de t’en empêcher. Elle n’est plus rien que la vieille coque dont tu t’es échappé comme une noix mûre.

— Eh bien, mère, dit Adam, je vais dire au capitaine que cela te fait de la peine que je reste, et qu’à cause de cela je préfère retourner à la maison ; de cette manière, il ne le prendra pas mal, j’en suis sûr, et je le désire. »