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adam bede.

longtemps qu’il se conduira ainsi, il faut le laisser tranquille.

— Ah ! monsieur, lorsqu’il vient à l’église il s’assied, remue la tête et a l’air si refrogné et mécontent quand nous chantons que je voudrais lui appliquer un bon coup sur le museau. Dieu me pardonne, ainsi que madame Irwine et Votre Révérence, pour parler ainsi devant vous. Et n’a-t-il pas dit que notre chant de Noël ne valait pas mieux qu’un barbotement dans un pot ?

— Eh bien, il n’a pas l’oreille musicale. Quand les gens ont la tête dure, vous savez qu’on n’y peut rien. Il n’amènera pas les gens d’Hayslope à son opinion, tant que vous chanterez aussi bien que vous le faites.

— Oui, monsieur ; mais ça vous fait soulever le cœur d’entendre mésuser des Écritures comme ça. Je sais autant de passages de la Bible que lui, et je pourrais réciter tous les psaumes en dormant, si vous veniez à me pincer. Mais ce n’est pas moi qui m’en servirais pour dire ce que j’ai à dire. Je ferais tout aussi bien en emportant chez moi la coupe de communion pour m’en servir à mes repas.

— C’est une remarque très-sensée de votre part, Joshua ; mais, comme je vous le disais… »

Tandis que M. Irwine parlait, on entendit un bruit de bottes et d’éperons sur le palier du vestibule, et Joshua Rann s’écarta rapidement pour faire place à la personne qui se présentait en disant, d’une belle voix de ténor :

« Le filleul Arthur peut-il entrer ?

— Entrez, entrez, filleul ! » répondit madame Irwine avec ce timbre de voix basse et demi-masculine que l’on rencontre souvent chez une femme âgée ; et un jeune gentilhomme, en habit de cheval, entra dans la chambre, le bras droit en écharpe. Il s’ensuivit cette agréable confusion de gaies interjections et de poignées de mains, de salutations mêlées de courts aboiements joyeux et remuement