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à Adam de qui il était le fils, avec quel sentiment de fierté il répondait : « Je suis le garçon de Thias Bede. » Il ne doutait pas que tout le monde ne connût Thias lîede. N’avait-il pas construit l’étonnant pigeonnier à la cure de Broxton ? C’étaient là d’heureux jours, surtout quand Seth, qui était de trois ans plus jeune, commença d’aller au travail aussi et qu’Adam devint alors maître, tout en étant apprenti. Puis arrivèrent les jours de tristesse, lorsque Adam, presque adolescent, vit Thias commencer à fréquenter les tavernes, Lisbeth à pleurer à la maison et à faire ses doléances aux oreilles de ses fils. Adam se rappelait bien cette nuit de honte et d’angoisses où, pour la première fois, il vit son père tout à fait hors de lui et insensé, hurlant une chanson incohérente au milieu de ses compagnons ivres au Chariot renversé. Il s’était échappé une fois, n’ayant que dix-huit ans, en partant au point du jour avec un petit paquet bleu sur l’épaule et son livre de mesures dans sa poche, se disant qu’il ne pourrait supporter davantage ses ennuis d’intérieur, qu’il voulait aller chercher fortune. Ne sachant où il allait, il mettait son bâton debout aux bifurcations de routes, et prenait celle vers laquelle il tombait. Mais, en arrivant à Stoniton, la pensée de sa mère et de Seth, laissés en arrière pour tout supporter sans lui, devint trop importune, et sa résolution l’abandonna. Il revint le jour suivant ; mais la douleur et la terreur que sa mère avait éprouvées pendant ces deux journées l’avaient dès lors toujours poursuivi.

« Non ! se dit maintenant Adam, cela n’arrivera jamais de nouveau ; cela me ferait une triste balance lorsque viendra le compte de mes actions au dernier jour, si ma pauvre vieille mère pesait contre moi. J’ai les épaules assez larges et fortes ; je ne serais qu’un lâche si je m’en allais en laissant le fardeau des misères à ceux qui ne sont pas à moitié aussi capables de le porter. « Ceux qui sont forts doivent