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adam bede.

moi, j’aime le jeu plus que le travail : ça doit t’arranger, — ça ne te laisse que plus d’ouvrage à faire. »

Avec ce discours de sortie, qu’il considérait comme très-concluant, Ben le Vif se chargea de son panier et sortit de l’atelier, suivi de près par Placide Taft et Jim le Roux. Seth hésitait et regardait fixement Adam, comme s’il attendait qu’il lui dit quelque chose.

« Iras-tu à la maison avant la prédication ? demanda Adam en levant les yeux.

— Non, j’ai mon chapeau et mon habit chez Will Masquery ; je ne rentrerai pas avant dix heures. Il se peut que j’escorte Dinah Morris jusque chez elle, si elle y consent. Personne de chez les Poyser ne vient avec elle, tu sais.

— Alors je dirai à la mère de ne pas t’attendre.

— Tu ne vas pas toi-même chez les Poyser, ce soir ? dit Seth presque timidement, comme il se retournait pour quitter l’atelier.

— Non, j’irai à l’école. »

Jusque-là Gyp était resté sur son lit confortable, relevant seulement la tête et surveillant plus attentivement son maître, en voyant partir les autres ouvriers. Mais, dès qu’Adam eut mis son compas dans sa poche et commencé à rouler son tablier autour de sa taille, Gyp s’élança et le regarda fixement au visage dans une patiente expectative. Si Gyp eût possédé une queue, il l’aurait bien certainement remuée ; mais, étant dépourvu de ce véhicule de ses émotions, il était comme beaucoup d’autres très-dignes personnages, destinés à paraître plus flegmatiques que ne les a faits la nature.

« Allons, Gyp, es-tu prêt pour le panier ? » dit Adam d’un ton de voix aussi doux que lorsqu’il avait parlé à Seth.

Gyp s’avança avec un court aboiement, comme pour dire : « Naturellement. » Le pauvre animal n’avait pas une grande variété d’expressions à son usage.