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maladies inévitables. Un homme peut être très-ferme sur d’autres points, et cependant se trouver sous une espèce de sortilège de la part d’une femme.

— Oui ; mais il y a une différence entre l’amour et la petite vérole ou même le sortilège, — c’est que, si vous découvrez la maladie à temps et que vous essayiez le changement d’air, il y a toute chance d’y échapper entièrement, sans aucun développement ultérieur. Et il y a certaines doses préservatrices qu’un homme peut s’administrer lui-même, en ayant toujours présentes à l’esprit les conséquences désagréables de sa faiblesse ; cela fait une espèce de verre noirci au travers duquel vous pouvez regarder une resplendissante beauté et discerner sa vraie silhouette ; quoique je craigne bien que peu à peu le verre enfumé ne vienne à manquer juste au moment où on en a le plus besoin. Je dirai même maintenant qu’un homme fortifié de la connaissance des classiques pourrait être entraîné à un mariage imprudent, malgré tous les avertissements que lui donnerait le chœur de Prométhée. »

Le sourire qui passa sur le visage d’Arthur était bien léger, et au lieu de suivre le tour plaisant de M. Irwine, il dit tout à fait sérieusement : « Oui, et c’est là le pire. C’est une chose horriblement vexante que, malgré toute notre volonté, nous soyons dirigés par des dispositions instantanées qu’il est impossible de calculer d’avance. Je ne pense pas qu’un homme soit tellement à blâmer s’il est entraîné malgré toutes ses résolutions contraires.

— Oui, mais ces dispositions d’esprit étaient en germe dans son individualité, mon garçon, tout autant que l’étaient ses réflexions, et encore plus. Un homme ne fait jamais rien de contraire à sa propre nature. Il porte en lui le principe de ses actions les plus exceptionnelles, et si nous autres, gens sensés, faisons de nous de fameux imbéciles dans quelque occasion particulière, nous devons en