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adam bede.

Un éclat de rire accueillit cette pointe d’Adam ; mais Seth lui dit très-sérieusement :

« Non, Adam, il ne faut comparer la religion de personne à de la bière forte. Tu ne peux prétendre que les dissidents et les méthodistes n’aient un sentiment religieux aussi profond que ceux de l’Église établie.

— Non, mon garçon, je ne me moque de la religion de personne. Que chacun suive en cela sa conscience. Seulement je pense qu’il vaudrait mieux que leur conscience leur permît de rester tranquillement dans l’Église, car on y peut apprendre une foule de bonnes choses. Et puis on peut aussi avoir une exagération religieuse ; nous avons besoin de quelque chose de plus que l’Évangile dans ce monde. Voyez les canaux, et les aqueducs, et les machines des mines de charbon, et les filatures d’Arckwright, là à Cromford ; je suppose qu’un homme doit savoir quelque chose de plus que l’Évangile pour faire toutes ces choses. Mais, à entendre quelques-uns de ces prêcheurs, vous croiriez qu’un homme n’a rien d’autre à faire toute sa vie qu’à fermer les yeux et regarder ce qui se passe dans son intérieur. Je sais qu’un homme doit garder dans son cœur l’amour de Dieu et de la sainte Bible. Mais que dit-elle, la Bible ? Eh bien, elle dit que Dieu mit son esprit dans l’artisan qui construisit le tabernacle, pour qu’il en fit les sculptures et toutes les choses qui demandaient une main habile. Et c’est là ma manière de voir ; l’esprit de Dieu est en toutes choses et en tous temps — les jours de travail comme le dimanche — dans les grands travaux et inventions, dans les plans et les machines. Et Dieu nous a donné notre intelligence et nos mains aussi bien que nos âmes ; et si un homme fait quelques petits ouvrages en dehors des heures de travail, — s’il construit un four pour éviter à sa femme d’aller chez le boulanger ; ou s’il gratte un peu la terre de son jardin pour faire venir deux pommes de terre au lieu d’une, il fait plus