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juste à temps, dit M. Irwine, comme Arthur s’arrêtait et enjambait l’appui de la fenêtre basse. Carroll, il nous faut encore des œufs et du café, et nous devons bien avoir quelque volaille froide pour manger avec ce jambon ? C’est comme au bon vieux temps, Arthur ; depuis cinq ans vous n’avez pas déjeuné avec moi.

— La matinée était engageante pour une promenade à cheval, dit Arthur, et j’aimais tant à déjeuner ainsi avec vous, quand vous me faisiez étudier ! Mon grand-père est toujours de quelques degrés plus froid à déjeuner qu’à tout autre moment du jour. Je crois que son bain du matin ne lui convient pas. »

Arthur avait à cœur de ne pas laisser voir qu’il venait dans un but spécial. Il ne se trouva pas plutôt en présence de M. Irwine, que la confidence, qui lui avait paru très-facile avant, lui sembla tout d’un coup la chose la plus difficile du monde, et au moment même où ils se touchèrent la main, il vit son projet sous un jour tout nouveau. Comment faire comprendre à M. Irwine sa position, à moins de lui raconter ces petites scènes dans le bois ; et comment les raconter sans avoir l’air d’un imbécile ? Et puis sa faiblesse à revenir de chez Gawaine ! et faire précisément le contraire de ce qu’il avait décidé. Irwine le trouverait faible et versatile à tout jamais. Toutefois cela pourrait arriver sans préméditation ; la conversation pouvait y amener.

« J’aime le moment du déjeuner plus que tout autre de la journée, dit M. Irwine. Aucune poussière ne s’est encore étendue sur notre esprit ; il reflète clairement les choses. J’ai toujours un livre favori près de moi, pendant ce repas, et je jouis tellement des fragments que j’y glane, que chaque matin, régulièrement, il me semble que je vais redevenir studieux. Mais bientôt voici Dent qui m’amène un pauvre diable qui a tué un lièvre, et quand j’ai fini de « justicier, » comme dit Carroll, je suis disposé à faire une prome-