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adam bede.

Mais il a une langue comme une lame tranchante, Bartle ; elle entame tout ce qu’elle touche. Voici le tournant du chemin, monsieur ; je vous souhaite le bonjour, puisque vous allez à Broxton.

— Adieu, Adam ! portez-vous bien. »

Arthur remit son cheval au groom, à l’entrée de la cure, et s’avança par l’allée gravelée vers la porte qui ouvrait sur te jardin. 11 savait que le Recteur déjeunait toujours dans sa chambre d’étude qui était à gauche de cette porte, en face de la salle à manger. C’était une petite chambre basse, appartenant à l’ancienne portion de la maison, obscurcie par les reliures foncées des livres qui garnissaient les murs ; cependant elle paraissait très-gaie quand Arthur atteignit la fenêtre ouverte. Car le soleil du matin tombait de biais sur le grand globe de verre à poissons d’or, posé sur un piédestal en scagliola, en face de la table à déjeuner déjà servie. À côté de cette table était un groupe qui eût réjoui l’œil où que ce fût. Sur une moelleuse chaise de damas rouge était assis M. Irwine, avec la brillante fraîcheur qu’il avait toujours en sortant de sa toilette du matin. Sa belle main, blanche et potelée, caressait le dos brun et frisé de Junon, et, derrière Junon, dont la queue s’agitait avec un calme plaisir maternel, ses deux petits chiens bruns se roulaient l’un par-dessus l’autre dans un bien heureux duo, se houspillant bruyamment. Sur un coussin plus éloigné se tenait Pug, avec l’air d’une pudique dame qui considérait ces familiarités comme des faiblesses animales qu'elle faisait semblant d’observer le moins possible. Sur la table, vers le coude de M. Irwine, était le premier volume du Foulis Æschylus, qu’Arthur connaissait bien. La cafetière d’argent, que Carroll apportait, exhalait une vapeur parfumée qui complétait les délices d’un déjeuner de célibataire.

« Bravo, Arthur, voilà un digne garçon ! Vous arrivez