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adam bede.

vel vol attachement chaque année. J’ai assez de motifs de reconnaissance. J’ai toujours eu la santé, la force et suffisamment d’intelligence pour prendre plaisir à mon travail. Je compte pour beaucoup d’avoir pu suivre l’école du soir de Bartle Massey. Cela m’a aidé à acquérir une instruction que je n’aurais jamais pu obtenir par moi-même.

— Quel fameux gaillard vous êtes, Adam ! dit Arthur après un silence, pendant lequel il avait examiné le grand individu qui marchait à ses côtés. Je pouvais allonger un coup de poing mieux que la plupart des autres étudiants, à Oxford, et cependant je crois que vous me terrasseriez bien vite, si j’avais à me battre avec vous.

— Dieu garde que je le fasse jamais, monsieur ! dit Adam se retournant vers Arthur avec un sourire ; j’avais l’habitude de boxer comme amusement ; mais je l’ai perdue depuis que j’ai été cause que le pauvre Gil Tranter a dû passer quinze jours au lit. Je ne me battrais plus contre aucun homme, à moins qu’il ne se conduise en coquin. Si l’on a affaire à un individu qui n’a ni honte ni conscience, il faut bien essayer ce qu’on peut obtenir par la force. »

Arthur ne rit point, car il était préoccupé d’une pensée qui l’amena bientôt à dire :

« Je crois bien, Adam, que vous n’avez jamais de lutte avec vous-même ; que vous étoufferiez un désir dont vous auriez reconnu l’injustice, aussi facilement que vous étendriez par terre un ivrogne qui vous aurait cherché querelle. Je veux dire que vous n’êtes pas versatile, voulant d’abord une chose, puis bientôt le contraire.

— Mais non, dit Adam après un moment d’hésitation. Non, je ne me rappelle pas m’être jamais retourné de cette manière, quand j’avais décidé, comme vous dites, que quelque chose était mal. Cela me répugne de faire ce que je sais devoir me charger la conscience. Depuis que j’ai su additionner, j’ai vu assez clairement qu’on ne peut jamais