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adam bede.

et je verrai devant moi votre visage tel qu’il est maintenant. C’est une chose singulière : quelquefois, quand je suis entièrement seule, assise dans ma chambre avec les yeux fermés, ou me promenant sur les collines, les personnes que j’ai vues ou connues, ne fût-ce que pour quelques jours, apparaissent devant moi ; j’entends leur voix et je les vois regarder et agir, presque mieux que lorsqu’elles étaient réellement près de moi et que je pouvais les toucher. Alors mon cœur est attiré vers elles et j’éprouve pour ce qui leur arrive les mêmes sentiments que pour ce qui me concerne ; je trouve de la jouissance à mettre tout cela devant le Seigneur et me reposer en son amour, pour elles comme pour moi. Aussi suis-je bien sûre que vous m’apparaîtrez. »

Elle s’arrêta un moment, mais Hetty ne dit rien.

« Cela a été une chose bien précieuse pour moi, continua Dinah, hier au soir et aujourd’hui, que de voir deux aussi bons fils qu’Adam et Setli Bede. Ils sont si tendres et si attentifs pour leur vieille mère ! Elle m’a raconté ce qu’Adam avait fait, pendant ces dernières années, pour venir en aide à son père et à son frère ; c’est étonnant quel esprit de sagesse et quelle instruction il a, et comme il est disposé à s’en servir en faveur de ceux qui sont faibles. Je suis sûre aussi qu’il a le cœur aimant. J’ai souvent remarqué, parmi ceux que je connaissais autour de Snowfield, que les hommes forts et adroits sont souvent les plus doux pour les femmes et les enfants ; et c’est joli de les voir porter les petits marmots comme s’ils ne pesaient pas plus que de petits oiseaux. Et les petits enfants paraissent toujours préférer le bras fort. Je pense qu’il en serait ainsi d’Adam Bede. Ne le croyez-vous pas, Hetty ?

— Oui, » répondit Hetty machinalement, car sa pensée avait tout ce temps été dans le bois, et il lui aurait été difficile de dire à quoi elle donnait son assentiment. Dinah vit qu’elle n’était pas disposée à parler ; mais elles n’au-