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adam bede.

CHAPITRE XIV

le retour à la maison

Tandis que cette séparation se passait dans la forêt, une autre avait lieu dans la chaumière. Lisbeth se tenait debout avec Adam devant la porte, s’efforçant, avec sa vue fatiguée, d’apercevoir encore Seth et Dinah qui montaient le versant opposé.

« Eh ! je suis fâchée de n’en plus rien voir, dit-elle à Adam en rentrant dans la maison. Je l’aurais volontiers gardée près de moi jusqu’à ce que je meure et que j’aille reposer près de mon vieux. Elle rendrait la mort plus facile ; elle a une voix si douce et ses mouvements sont si calmes ! Je ne serais pas étonnée qu’elle fût représentée dans cette image de ta Bible neuve : l’ange assis sur la grosse pierre à côté du tombeau. Eh ! je ne craindrais pas d’avoir une fille comme ça ; mais personne n’épouse celles qui sont bonnes à quelque chose.

— Eh bien, mère, j’espère que tu l’auras pour fille, car Seth a du goût pour elle, et j’espère qu’avec le temps elle en prendra pour lui.

— À quoi sert de parler de ça ? Elle ne pense pas à Seth. Elle s’en va à vingt milles d’ici. Comment prendra-t-elle du goût pour lui, je voudrais bien savoir ? Pas plus que le pain ne peut lever sans levain. Les livres de chiffres auraient pu te l’apprendre mieux que cela, je pense, autrement tu ferais tout aussi bien de lire des imprimés ordinaires, comme Seth le fait.

— Non, mère, dit Adam en riant, les chiffres nous disent bien des bonnes choses, et sans eux nous ne pourrions aller loin ; mais ils ne nous disent rien sur les sentiments des