Page:George Eliot Adam Bede Tome 1 1861.djvu/189

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
173
adam bede.

n’avait abouti à rien, à moins que rien. Il marcha droit dans le parc, heureux de sortir du bosquet, qui, certainement, était hanté par son mauvais génie. Ces tilleuls et ces bouleaux si polis, il y avait quelque chose d’enivrant rien qu’à les voir ; mais les vieux chênes aux vigoureux troncs noueux n’avaient en eux aucune influence énervante, leur vue seule pourrait donner à un homme quelque énergie. Arthur s’égara au milieu des étroites ouvertures des palissades, errant sans chercher d’issue, jusqu’à ce que la nuit remplaçât presque le crépuscule sous le feuillage touffu, et que les lièvres parussent noirs en s’élançant au travers du sentier.

Il était impressionné bien plus vivement que le matin ; c’était comme si son cheval se fût refusé à faire un saut et eût osé se regimber contre son maître. Il était mécontent de lui-même, irrité, mortifié. Il ne fixa pas plus tôt son esprit sur les conséquences probables d’émotions semblables à celles qui s’étaient emparées de lui dans ce jour, de continuer à s’occuper d’Hetty, de s’accorder les occasions de ces légères caresses auxquelles il s’était laissé entraîner si vite, qu’il vit l’impossibilité d’un tel avenir pour lui. Faire la cour à Hetty était chose bien différente que de faire la cour à quelque jolie personne de son rang ; ceci pouvait se considérer comme un amusement des deux côtés, et s’il devenait sérieux, rien ne s’opposait à une union. Mais on médirait immédiatement de la petite fille s’il arrivait qu’on la vît se promener avec lui ; et puis ces excellentes gens, les Poyser, pour lesquelles une bonne réputation était aussi précieuse que s’ils avaient eu le meilleur sang du pays dans leurs veines ! il se prendrait en haine s’il était cause d’un tel scandale sur les terres qui devaient lui appartenir un jour, et au milieu de tenanciers dont il voulait être respecté. Il ne lui semblait pas plus facile de tomber ainsi dans sa propre estime que de pouvoir se briser les