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adam bede.

tout, quand tu pourrais en trouver qui feraient de toi un homme, je ne dirai rien, à présent que ton père est mort et noyé, car je ne vaux pas mieux qu’une vieille poignée qui n’a plus de lame. »

Adam, incapable d’en supporter davantage, se leva silencieusement de son banc et passa de l’atelier dans la cuisine. Mais Lisbeth le suivit. « Tu ne veux donc pas monter et voir ton père ? J’ai tout arrangé à présent, et il aimerait que tu allasses le regarder, bien sûr, car il était toujours content quand tu étais doux avec lui. »

Adam se retourna de suite et dit : « Oui, mère, montons ! Viens, Seth, allons ensemble ! »

Ils montèrent et le silence régna pendant cinq minutes. Puis la clef tourna de nouveau et Ton entendit un bruit de pas sur l’escalier. Mais Adam ne redescendit pas ; il était trop fatigué et épuisé pour se trouver davantage en face de la douleur plaignante de sa mère, et il alla se reposer sur son lit. Lisbeth ne fut pas plutôt rentrée et assise dans la cuisine qu’elle jeta son tablier sur sa tête et recommença à pleurer et gémir, et à se balancer comme auparavant. Seth se dit : « Elle sera bientôt plus tranquille, maintenant que nous avons été en haut. » Et il retourna dans l’arrière-cuisine pour alimenter son petit feu, espérant qu’il pourrait, avant peu, amener sa mère à prendre son thé.

Lisbeth se balançait ainsi depuis plus de cinq minutes, faisant entendre un sourd gémissement à chaque mouvement en avant, quand elle sentit tout d’un coup une main se poser légèrement sur la sienne et une douce voix grave lui dire : « Chère sœur, le Seigneur m’a envoyée pour voir si je pouvais vous apporter quelque soulagement. »

Lisbeth s’arrêta et prêta l’oreille, sans retirer le tablier de dessus son visage. La voix lui était inconnue. Était-ce peut-être l’esprit de sa sœur qui revenait d’entre les morts après tant d’années ? Elle tremblait et n’osait regarder. Di-