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adam bede.

plus quee la bonté du jeune mari et la patience de l’homme âgé. Ses yeux continuèrent à errer vaguement jusqu’au moment où Seth entra, et commença à retirer quelques-uns des objets dispersés et à débarrasser la petite table de sapin, afin de pouvoir y poser le thé de sa mère.

« Que veux-tu faire ? lui dit-elle d’un air chagrin.

— Je voudrais te voir prendre une tasse de thé, mère, répondit Seth avec tendresse. Cela te fera du bien, et je veux soigner deux ou trois de ces choses, pour que la maison ait l’air plus confortable.

— Confortable ! comment peux-tu parler de rendre les choses confortables ? Laisse ça, laisse ça ! Il n’y a plus de contentement pour moi, continua-t-elle, les pleurs venant avec les paroles, maintenant que ton pauvre père n’est plus. Je l’ai soigné, lui ai préparé ses repas pendant trente ans ; il était toujours si content de tout ce que je faisais pour lui, toujours disposé à faire quelque chose pour moi quand j’étais souffrante, heureux et joyeux de m’être agréable. Il portait l’enfant, qui en pesait bien deux, pendant cinq milles, sans jamais grommeler, jusqu’à War’son Wake, parce que je voulais aller voir ma sœur, qui mourut au Noël suivant. Lui, se noyer dans le ruisseau que nous passâmes le jour de notre mariage en venant ensemble à la maison, où il avait fait une quantité de rayons pour y mettre mes assiettes et autres choses, et il me les montra avec tant de fierté, parce qu’il savait que ça me ferait plaisir ! Et il devait mourir sans que je le sache, pendant que je dormais dans mon lit, comme si je ne m’en inquiétais pas ! Et moi je vis pour voir ça ! Et nous étions jeunes alors, et nous pensions que les choses iraient si bien pour nous quand nous serions mariés ! Laisse ça, laisse tout ça ! Je ne veux pas de thé ; je ne tiens plus à boire ou à manger jamais. Quand un bout du pont est tombé, à quoi sert que l’autre tienne ? Je ferai aussi bien de mourir et de suivre