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adam bede.

— Non, il n’était pas du tout fâché ; il a été très-amical pour moi. J’ai été entraînée, je sais à peine comment, à lui parler avec beaucoup de franchise, car je l’avais toujours supposé un Sadducéen mondain. Mais son expression est aussi agréable que le soleil du matin.

— Agréable ! et qu’attendiez-vous d’autre de lui que de l’agréable ? dit madame Poyser avec impatience en reprenant son tricotage. Je trouve que son expression est très-agréable en effet, qu’il est né gentilhomme, et que sa mère est une vraie peinture. Vous auriez beau faire le tour du pays, vous ne trouveriez pas une autre femme de soixante-six ans tournée comme celle-là. C’est beau de voir un homme comme lui dans la chaire le dimanche ! Aussi dis-je à Poyser : c’est comme de regarder une belle gerbe de blé, ou une prairie avec un grand troupeau de vaches ; cela vous fait trouver que le monde est une bonne chose. Mais quant à de telles figures que celles après qui vos méthodistes courent, j’aimerais autant voir un ramassis de bœufs d’Écosse aux côtes maigres sur un terrain communal. De fameuses gens pour vous apprendre ce qui est juste ! eux qui ont l’air de n’avoir jamais goûté de leur vie à quelque chose de mieux qu’une tranche de lard et du gâteau aigre. Mais qu’est-ce que M. Irwine vous a dit de votre idée folle de prêcher sur la Pelouse ?

— Il a seulement dit qu’il en avait entendu parler ; il n’a point paru en éprouver de déplaisir. Mais, chère tante, ne pensez plus à cela. Il m’a appris quelque chose qui, à coup sûr, vous fera de la peine, ainsi qu’à moi. Thias Bede s’est noyé hier au soir dans le nant des Saules, et je pense que la vieille mère doit avoir grand besoin de consolation. Peut-être puis-je lui être de quelque utilité, et je vais m’v rendre.

— Seigneur mon Dieu ! Mais il vous faut prendre une tasse de thé avant de partir, mon enfant, dit madame Poy-